vendredi 18 avril 2014

Témoignage de Sophie - IVG Médicamenteuse

Je me suis rendue compte que j'étais enceinte parce que je sentais un battement dans mon ventre (certainement les vaisseaux sanguins qui s'activaient), avant toute autre chose. Bien sûr, par la suite, je n'ai pas eu mes règles, et mon corps a commencé à changer. Il m'a malgré tout fallu faire deux prises de sang pour pouvoir confirmer la grossesse, qui n'était pas détectable au début.

J'ai dû juguler l'euphorie qui s'est emparée de moi, j'avais envie d'être heureuse, mais je savais comment cette histoire allait se terminer, et je voulais éviter de trop m'attacher à l'idée d'un enfant. Mon compagnon, qui avait déjà vécu cela, a pris peur, et m'a bien fait savoir qu'il n'en voulait pas (même si il était prêt à accepter que je ne puisse pas me résoudre à avorter). 

On m'a conseillé un obstétricien dans une clinique, et j'avais alors perdu ma carte vitale (pas très pratique dans ces conditions : j'ai dû avancer une somme considérable, qui m'a bien sûr été remboursée par la suite!). 

Le choix a été difficile, je passais mon temps à pleurer. Mais je sais que j'ai fait le bon. J'aurais mis au monde un bébé qui aurait été affecté par la frustration de son père, et le manque d'argent. J'aurais certes donné la vie, mais j'aurais détruit celle de mon amoureux, j'aurais rendu mon enfant malheureux, et ça, non. Jamais. 

J'ai avorté par comprimé, comme ma grossesse était assez jeune. Le gynécologue a été un peu rude, mais je pense que la situation ne m'a pas donné un regard très objectif. Il m'a un peu stimulée, pour voir ce que je voulais vraiment (c'était pas facile, alors je restais muette, je pouvais pas répondre que je le voulais vraiment, parce que ce n'était pas totalement vrai). 

Lors de la première échographie, on n'a pas trouvé l'embryon, mais il a été détecté une semaine plus tard. Lors de la prise du médicament, le docteur, compréhensif, a écrit la mention "lu et approuvé" à ma place. Je lui en suis reconnaissante. Lors de mon séjour de quelques heures à l'hôpital, tout s'est bien passé, l'infirmière était très gentille. J'ai eu très mal en avortant, parce que je ne me suis presque pas médicamentée (je voulais sentir). Ça a été dur psychologiquement, mais je m'en suis remise très vite physiquement. 

Aujourd'hui, je devrais avoir un petit bout de deux mois, théoriquement. Quand j'y pense, je me dis que j'aurais aimé avoir un enfant avec mon compagnon, mais je suis très satisfaite de ne pas avoir d'enfant à charge tandis que je finis à peine ma licence. Je sais que j'ai fait le bon choix, même si ce n'était pas forcément celui que je souhaitais, et qu'il m'a demandé beaucoup de courage, mais je m'en remets. J'ai évité de briser des vies, d'apporter du malheur par égoïsme, et ça, ça n'a pas de prix.

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